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27 février 2014

Dernier billet d'Istanbul. De Vancouver à Sochi, en passant par Rye Beach

Je suis assis sur des rochers, sur le bord d’une baie, du côté asiatique d’Istanbul. Un quartier résidentiel. Des condos. Une promenade de bord de mer, comme il en existe dans tous les pays du monde.

J’ai quitté l’hôtel Antis vers 11 h. J’ai monté vers le parc Sultan Ahmet, puis j’ai poursuivi mon chemin en suivant le parcours du tramway. Je suis brièvement entré dans le Grand Baazar et l’ai traversé d’un pas rapide. Le magasinage, encombré de gens, très peu pour moi.

J’ai tenté d’entrer sur le campus de l’Université d’Istanbul sans succès. À tous les accès, ils demandent une carte d’identité. Mon gros grand sourire et ma carte d’identité de l’Université de Sherbrooke n’ont pas réussis à attendrir la gardienne de sécurité. Pas de chance.

J’ai visité la Mosquée Süleymaniye, construite entre 1550 et 1557 pour le sultan Soliman le Magnifique. Comble de chance cette fois-ci. La mosquée a été entièrement restaurée et remise à son état originel. D’une beauté époustouflante.


En descendant vers l’eau et le terminal de traversiers, j’ai parcouru un quartier clairement défavorisé. Immeubles en ruines, gens en train de trier les montagnes de détritus dans certaines cours. Certains taudis qui tiennent à peine debout abritent pourtant des familles, à preuve ces vêtements suspendus à des cordes à linges. Comme partout, la misère côtoie l’abondance.

J’arrive au quai à 14 h, achète un jeton et monte à bord. Le timing est parfait. Le navire quitte à 14 h 10. La traversée dure 25 minutes et me mène au terminal de Kadiköy. L’endroit est immense et sert de point central pour les autobus et taxis de ce côté du Bosphore.


Au lieu de suivre les indications du guide que m’a donné Catherine Kornegay lors de notre arrivée à Sochi, je me dirige vers l’eau. Je marche dans des rues bondées de turcs et de touristes depuis deux jours. J’ai besoin d’air frais et d’espace. Bien m’en pris. Je marche sur une magnifique promenade riveraine. L’enfant est trop heureux de marcher sur des roches qui lui rappellent la côte Atlantique du New Hampshire ou celle des Iles-de-la-Madeleine. Je gambade d’un rocher à l’autre, telle une chèvre de montagne. Heureux vous dites ?


Je dépasse la pointe du cap et découvre une baie. Je ressens une extraordinaire impression de déjà-vu. En 2010, après les Jeux de Vancouver, je m’étais retrouvé, vers la fin du voyage, à Horseshoe Bay (billet à lire, se trouvant ici). Le ciel était nuageux, l’air frais. Comme en ce moment.

Sur le bord de la mer, bercé par le son de l’eau dans les rochers, les cris de goélands et sons des bateaux, j’avais conclu mon aventure à Vancouver, me promettant d’en revivre une autre à Sochi en 2014.

J’ai vu les hautes montagnes, respiré l’air sec en altitude. J’ai ouvert les yeux le plus grand possible, question d’emmagasiner toute cette lumière de sommets enneigés. Et là, à la toute fin du voyage, je suis sur des rochers identiques à tous ceux qui servent à enrocher les rivages de mer.

Le stylo trace, en bleu, ces lettres qui forment des mots, puis des phrases. La page blanche se recouvre. J’ai la preuve, une fois de plus, que la planète bleue, quoi qu’on en pense, est minuscule.


Par cette eau qui touche presque à mes pieds, je pourrais me rendre, en voilier, à l’écluse numéro un du Canal de Chambly. Le voyage serait long, ardu, mais tout comme cette goutte d’eau qui use le marbre, lentement, ce serait possible.

Je porte le manteau BlackMountain de mon père. Je viens juste d’écrire cette phrase et j’ai déjà les yeux pleins d’eau.

Je viens de sauter dans le temps. Je suis le petit garçon bronzé, cheveux longs et bouclés, qui est assis dans les roches à Rye Beach, avec sa petite sœur Véronique, ses parents, Rollande et Benoit, et ses oncles et tantes, Yvonne et Benoit, Annette, Cécile, Jacqueline et Jean-Paul. Ça y est, je pleure à chaudes larmes.

Papa, tu n’as pas pu faire tous les voyages dont tu rêvais. J’ai sciemment apporté ton manteau avec moi afin que de là-haut, tu découvres la Russie, Istanbul et Amsterdam. Merci papa de m’avoir appris à être généreux, serviable et confiant envers les autres. Cela me sert à tous les jours. Et en voyage, je me sens toujours comme chez moi.

Parce que tu le sais, toi qui connaissais tous les recoins merveilleux du Québec. Peu importe notre origine, notre langue et son accent, nous sommes tous humains, liés par la planète bleue.

16 h 50. Le temps est venu d’essuyer les larmes, de ranger carnet et stylo et de laisser mon intuition guider mes pas sur le chemin menant au traversier. Cette nuit, à 3 h 15, une navette m’emmène à l’aéroport. Dans quelques heures, je serai à Amsterdam.

Le soleil sort enfin des nuages. La vie m’envoie un autre crisse de beau message.



*** Ouf ! J’étais inspiré pas à peu près cet après-midi ! En retranscrivant, j’ai coupé plusieurs paragraphes. Et je suis rendu à 845 mots ! Merci d’avoir lu jusqu’ici !

26 février 2014

Une zone tampon entre deux mondes

Je ressens actuellement l’impression de vivre entre deux mondes. 20 h 40, un mercredi soir de février. Il y a 48 heures, j’étais à l’aéroport de Sochi, avec mes collègues bénévoles. Dans 48 heures, je serai de retour au pays. Nathalie et les enfants m’accueilleront à Dorval. Ma présence à Istanbul s’avère d’une grande symbolique. Une ville millénaire située à la frontière de l’Europe et de l’Asie. Un gars de 45 ans qui vient de quitter son emploi après onze ans pour démarrer son entreprise. La jeunesse d’un bord, l’âge mûr de l’autre.

Sans le savoir à l’époque où j’ai réservé mes vols, j’ai pris une bonne décision. Je peux décompresser et faire le vide. Du 4 au 24 février, j’ai rarement été seul. Pour un introverti de mon genre, qui aime quand même les interactions sociales, ce fut ardu par moments. Hier, j’ai mis mon blogue à jour. J’ai visité la Mosquée bleue. Aujourd’hui, je suis parti à la découverte de lieux fabuleux et chargés d’histoire : Hagia Sophia, la Citerne basilique et le Palais Topkaki.

Le ciel était nuageux, le mercure indiquait 6 degrés celcius. Il y avait beaucoup de touristes dans Sainte Sophie. Je n’ose pas imaginer de quoi cela a l’air en plein été ! Je suis sans mots pour décrire ces merveilles. Mes photos ne rendent pas du tout justice à l’émotion que je ressentais dans ces lieux centenaires.


Qui sommes-nous, pour affirmer que nous possédons la vérité ? Eux aussi, les sultans, pensaient la détenir. Est-ce que nos gratte-ciels modernes seront encore debout dans 400 ans ? Notre pont Champlain tombe en ruine après 50 ans.

J’ai poursuivi ma marche en me rendant à la gare de Sirkeci, située près du pont Galata, sur le bord du Golden Horn. Le fameux train Orient Express, rendu célèbre par Agathie Christie, s’y arrêtait jadis. Un petit musée en relate l’histoire. Le pont Galata et ses dizaines de pêcheurs constitue une vision étrange, surtout avec ses commerces. J’ai emprunté la rue piétonnière Istiklal et ai abouti au Square Taksim. Une journée de semaine, des milliers de personnes dans la rue. Impressionnant.


J’ai dû marcher un bon 15 kilomètres aujourd’hui. À un rythme lent, tout occupé que j’étais à m’émerveiller devant ce monde si différent de ce que je connais. De minuscules commerces partout, des hommes qui boivent du thé dans des petits verres, tout en discutant. Et que dire de l’appel à la prière, diffusé par les minarets des mosquées ? Fascinant.

Demain, je traverse du côté de l’Asie. Je quitte Istanbul à 5 h 55 vendredi matin. En route vers ma famille et mes amis.

Je lis les actualités sur mon fil Facebook. Mes nouveaux amis du monde reviennent à la maison. Nous vivons le choc du retour à la réalité. C’est pourquoi cet arrêt à Istanbul s’avère génial. Je me retrouve et pourrai, à mon arriver, m’ouvrir aux autres.

25 février 2014

À Istanbul.

Je viens de passer presque quatre heures à rédiger et publier des billets. Vous aurez de la lecture à faire aujourd’hui, chers lecteurs ! Je suis dans ma chambre, à l’hôtel Antis, situé dans le vieux Istanbul. Malgré l’heure tardive de mon arrivée, à 8 h 45 j’avais les yeux ouverts. Je plonge dans l’écriture.

À 9 h 30, j’étais assis dans la petite salle à manger. Une chaise en bois, coussin et dossier en cuir. Devant moi, une nappe en dentelle recouvre la table. J’ai une tasse de café. Mon premier depuis mon départ de Richelieu le 2 février. Un verre de boisson à l’orange l’accompagne. Je déguste, très lentement, mon petit-déjeuner. Œufs brouillés, patates rissolées, saucisson, fromage et pain. Le plafond est blanc et les moulures sont dorées. De la musique turque joue en sourdine.

La vie d’auberge espagnole est terminée. Adieu chaises et tables Rubbermaid. Adieu assiettes et ustensiles jetables. Terminée la bouffe de cafétéria. J’écris dans mon carnet Moleskine noir, savourant la relative tranquillité qui m’entoure. En diagonale à ma droite, trois allemandes. Derrière elles, une famille française. À une autre table, deux dames anglaises.

Il pleuvait à mon arrivée. Il pleut encore. Je prendrai la journée relaxe, préparerai mon itinéraire pour les deux prochains jours. J’ai un lit simple à peine plus grand que celui de ma chambre au village no 4. Pas grave du tout ! Le matelas est plus épais, j’ai ma douche et mon lavabo.

Au réveil, j’ai réalisé que la vie me faisait, une fois de plus, un incroyable clin d’œil. J’occupe la chambre 304. Un trois et un quatre qui font un sept. Comme mon chiffre de vie, le 34/7. Je suis dans cette ville mythique qui partage l’Europe et l’Asie. Je me définis comme un créateur de liens, qui aide à faire du sens entre les gens et les lieux. À 45 ans, je suis au mitan de ma vie. D’un côté, je tends la main aux enfants. De l’autre, je la tends aux aînés. D’où le concept de la carte que j’ai créé pour remercier tous ceux que j’ai côtoyé à la CIGM au cours des onze dernières années.


Le projet qui m’a occupé l’esprit pendant des mois est derrière moi. Je débute aujourd’hui la rédaction du livre qui racontera mon expérience à Vancouver et à Sochi. J’y ferai des liens avec la vie. Je me retrouve devant une page blanche. Le choix de Page blanche conseil comme nom d’entreprise n’est pas fortuit. La réalisation de tout projet, de tout rêve débute par un dessin ou des mots sur une page blanche. Mes collègues de la CIGM m'ont d'ailleurs remis une carte faite sur mesure pour moi par Mireille Rouillard.


Un carnet Moleskine. Un stylo Pilot Dr. Grip gel. Mes cinq sens. Un état d’observation et d’émerveillement. Une caméra et un MacBook Air. Je transporte mon bureau dans mon sac à dos.

La page blanche ne m’effraie plus. De août à janvier dernier, grâce à mes rencontres avec la psychothérapeute Vera Heller, spécialisée en art thérapie, j’ai compris que je possédais tout en moi. Que je pouvais enfin déployer mes propres ailes. Mon chemin est clair. Je suis en paix avec moi-même. Le livre, la conférence. Je pars à la rencontre des jeunes dans les écoles primaires et secondaires, des adultes dans les bibliothèques municipales. Je veux raconter ce que la vie a de plus beau à offrir : le partage et la collaboration qui se crée entre les humains.

Juste avant que je débute la rédaction de ce billet, j’ai reçu une alerte Google à mon sujet. Le Chambly Matin Express a publié un article sur moi. Les mots sont élogieux et confirment le chemin que je veux suivre.


Merci de me lire. Merci de partager mon blogue avec vos proches.

Dernières heures à Sochi.

Nous n’arrivons pas à le croire. Après une trentaine d’heures de voyage, le 4 février, nous faisions notre entrée au village no 4. Tout était nouveau. Nous étions en mode survie, épuisés par le manque de sommeil. Il fallait tout apprendre, le plus vite possible. Le stress était toujours présent. Course pour obtenir l’accréditation et l’uniforme. Attente. Et encore attente.

Depuis deux jours, les bénévoles quittent les résidences. Je viens de croiser un groupe de petits nouveaux, tous fiers de porter leur accréditation des paralympiques, sac de 16 livres d’équipement à l’épaule. Leur regard dénote la nouveauté et le stress qu’ils vivent. Tels des vétérans, nous les regardons passer. Ils portent en eux l’espoir que nous avions il y a 20 jours. Ils ne savent pas encore que ceux qui travaillent à la montagne passent de 4 à 5 heures par jour en transport. Que nous retrouvons notre lit vers une heure du matin et que la journée débute à 6 h. Je me sens comme dans un film de guerre, alors que les colonnes se croisent. Ceux qui reviennent du front et ceux qui y montent, frais et dispos.

Aujourd’hui, c’est l’heure du grand départ. Kevin a réservé trois taxis pour nous. À 19 h, nous disons adieu à la cantine, à notre auberge espagnole.

Je prends le bus à midi, en direction de Adler. Je veux me promener sur le bord de la mer. Me laisser bercer au son des vagues. Et compléter mes achats de cadeaux. Tout comme à Vancouver, au lendemain des Jeux, la vie reprend son cours normal. Plus de trace d’uniformes aux couleurs des pays dans les rues. Que des citoyens normaux, de retour à une vie normale. J’éprouve un grand calme à marcher dans les petites rues menant à la mer. C’est vraiment une station balnéaire ici. Des palmiers partout, de larges trottoirs menant au boardwalk.


Le démontage est déjà en cours. Je m’installe sous la trajectoire de départ des avions. J’observe ces oiseaux d’acier qui emportent des gens vers leurs familles, la tête remplie de souvenirs. Pendant ce temps, la majeure partie de nos amis russes se retrouvent dans un train, pour des durées variant de 18 heures à six jours. C’est qu’elle est immense, la mère patrie. Neuf fuseaux horaires ! Le Canada en compte cinq.


Je reviens au parc olympique en marchant lentement. Je croise des canadiens qui étaient bénévoles pour la Maison du Canada. Eux aussi confirment que le traitement qu’ils ont reçu de la part du Comité olympique canadien était pitoyable. Je suis extrêmement déçu de cela. Tu donnes ton 100% pendant des jours et des jours et tu ne reçois en retour qu’une simple paire de mitaines et un foulard (que tous avaient déjà acheté par eux même!). Avec des remerciements du bout des lèvres. Pas fort.

J’ai été mieux traité par le comité organisateur russe que ne l’ont été les canadiens bénévoles au service des canadiens.

Les taxis arrivent. Seulement deux sur les trois promis. Le groupe part et me laisse au coin de la résidence. Darima discute avec le chauffeur. Il reviendra pour moi puis fera un autre aller-retour pour elle, vers la gare cette fois-ci. Il tient parole.

À 19 h 50, je rejoins mes amis internationaux. Catherine et Kevin, de San José, poursuivent leur voyage pendant cinq semaines, pour skier. Catherine vient de prendre sa retraite comme prof en hygiène dentaire, après 37 années de service. Igor, un russe qui réside en Floride depuis 1991, retourne chez lui. Jolanta retrouvera Vilnius en Lituanie. Andrea, ses filles à Chertsey, en Outaouais. Elle travaille à Ottawa, au conseil national de recherche du Canada. Une femme est assise près de notre table. Je m’approche. “Nadine?” “Yes! Oh, Christian!” Une autre rencontre d’ami Facebook. Nous nous sommes suivis pendant des semaines, commentant les expériences de chacun.

L’enregistrement est chaotique au plus haut point. Le douanier très sympathique. Adieu le stress de l’arrivée. Je me permets même de rigoler avec lui. L’avion décolle avec 40 minutes de retard.

Chère Russie, ce n’est qu’un au revoir. Je reviendrai te visiter. Parce que tu possèdes une grande histoire et des lieux magiques. Parce que les médias occidentaux me font chier, avec ces nouvelles négatives sur ton peuple. Tous les russes que j’ai rencontré ont été d’une immense gentillesse avec moi. David Swayne a serré la main à Vladimir Poutine. Une poignée de main filmée, qui démontre un tout autre aspect de cet homme. Martine Salomon lui a aussi serré la main et a jasé avec lui.

Merci, merci, merci de m’avoir accueilli chez toi !

Go Canada Go !

Le moment tant attendu est arrivé. Cet après-midi, l’équipe masculine de hockey joue pour l’Or. J’espère que l’exploit des filles motivera nos grosses vedettes de la NHL. Parce que je n’ai pas du tout aimé l’attitude des stars américaines, lors de leur déconfiture totale contre la Finlande. Ils étaient pitoyables et ridicules.

Mon objectif ce matin consiste à acheter des souvenirs pour ma famille. Durant les Jeux, la file d’attente au magasin Bosco du Parc olympique dépassait toujours les 90 minutes. Je n’ai donc pu m’y rendre. Je passe la sécurité type aéroport et marche vers l’une des entrées du personnel. Il est 9 h 50. Le match de hockey est à 16 h. Je me fais refuser l’accès car je n’ai pas de billet. Je pogne les nerfs et engueule les quatre bénévoles. “I’ve been here three weeks, working my ass off in the mountains, commuting for 5 hours every day. I am coming to buy gifts at the Bosco store. Spending more roubles in Russia. You let me go ! I don’t care about the damn rules. Please !” Le miracle se produit, le chef d’équipe sort un billet de sa poche. Je marche vers le magasin, en furie totale.

J’effectue quelques achats, déçus de voir qu’il n’y a plus de beaux t-shirts pour les femmes, ni de papeterie et porte-clé. Ça ressemble à un Zellers qui a remplit ses tablettes de ce qu’il reste en inventaire, avant la fermeture.

Il fait très beau. 11 h 15. Je ne sais pas sur quel pied danser. Si je sors du parc, je ne peux y revenir. Une voix m’interpelle. “Christian ?” C’est ma mère qui va être contente en lisant ce qui suit. Après Marie-Chaton à la Place de la francophonie à Vancouver, voici Marie-Rose au Parc olympique à Sochi. Marie-Rose réside à Honfleur, sur la Rive-Sud de Québec. Nous sommes devenus amis Facebook avant notre départ. Elle était bénévole pour le comité olympique canadien (COC). Une autre rencontre en face à face avec une amie virtuelle. On se promène dans le parc, en échangeant sur nos expériences respectives. Elle n’est pas impressionnée du tout par le COC. Pour eux, il y a deux classes de gens. Les employés permanents, qui reçoivent tout plein de vêtements et de billets et les bénévoles, qui ont défrayé de 5 à 10 000$ chacun pour être ici. Zéro reconnaissance de la part des permanents envers les bénévoles. Une belle leçon pour moi, qui veut aider les organisations à gérer leurs bénévoles !

Alors que nous nous trouvons dans la Russia Fan House, nous assistons en direct à la fin de l’épreuve de 50 km de ski de fond. L’incroyable se produit pour la Russie : un podium parfait ! Quelle conclusion extraordinaire à ces Jeux qui avaient mal commencé pour eux. Avec les victoires à Laura, la Russie prend la tête du classement des médailles. Wow !

Je n’arrive à obtenir un accès à la maison du Canada. Je quitte le parc olympique et vais rejoindre Martine Salomon au village Omega. Nous regardons le hockey dans un restaurant. David Swayne, un policier ontarien qui réside à mon village et travaille au Endurance Village, nous rejoint. Nous crions comme des fous à chaque but. Les proprios nous trouvent tellement sympathiques qu’ils nous offrent une tournée de bière.


On reste là pour regarder la cérémonie de clôture. Le restaurant se remplit. Des bénévoles, des journalistes, des russes. Nous ne pouvons nous empêcher de verser quelques larmes lorsque l’ours éteint la flamme. Nous sortons dans la rue pour regarder le feu d’artifice.


Et voilà. Les Jeux prennent fin pour moi. Martine continue l’aventure, pour les paralympiques. Son conjoint, Rock vient la rejoindre. Nous nous reverrons au Québec à son retour, à la fin mars. Je vous souhaite du bon temps ensemble ici.

Une médaille d’or en biathlon !!

Je n’arrive pas à le croire. Ce quart de travail, samedi 22 février, constitue mon dernier tour de piste dans l’équipe service aux évènements du centre de ski de fond et biathlon Laura. Le soleil brille. Notre équipe sera aux premières loges. Nous contrôlons l’accès au secteur A, dans le stade de biathlon.


Le briefing, comme tous les jours, est en russe. J’observe le langage non-corporel, suis des yeux les mains qui se tendent vers les points stratégiques. Avec l’expérience de Vancouver, j’interprète correctement un 70-80% des choses. Dernière épreuve de biathlon, le relais 4 x 7,5 km hommes. Les russes sont friands de ce sport qui exige des capacités athlétiques hors de l’ordinaire. Skier à fond de train, s’arrêter, calmer la respiration, tirer et repartir à fond de train. Spectaculaire !

Les spectateurs entrent peu à peu dans le stade. Hier, quand j’étais dans le tunnel, un couple de russe dans la trentaine est venu me voir. Nous avons échangé des épinglettes et nous nous sommes promis de nous revoir aujourd’hui pour échanger nos drapeaux respectifs. Ils me retrouvent à mon poste, tout sourire. Il sort son drapeau. Je sors mon drapeau du Québec, la version officielle provenant de l’assemblée nationale. Je leur donne aussi un drapeau canadien de plus petite taille. Les russes de mon équipe observent la scène. Ils constatent la très grande émotion qui m’habite, le trémolo dans ma voix. Je leur explique qu’échanger un drapeau, dans un tel évènement, constitue une grande marque de respect et de fraternité.

L'homme qui me regarde est le père des athlètes norvégiens.

Quelques minutes plus tard, un homme s’approche de moi. Il m’explique que ses deux fils (Tarjei et Johannes Thingnes BOE) participent au relais et qu’il aimerait pouvoir se rendre près de l’endroit où les médailles seront remises. Je lui explique que ma réponse de canadien est oui et que, membre d’une équipe russe, je dois obtenir la permission de mon chef d’équipe. Darima est enchantée de cette mission. Elle connait tous les athlètes et accompagnera avec un immense plaisir le papa et la maman. Les norvégiens démarrent en force l’épreuve. Les gens se bousculent à notre accès. Les russes remontent et remporteront l’or. Leur première médaille d’or en biathlon aux Jeux de Sochi. C’est la folie furieuse ! Cette médaille, obtenue dans un sport qui les fascine, met un baume sur le drame national de la déconfiture de l’équipe masculine de hockey.





La sortie des spectateurs est extraordinaire. Les russes sourient, sont en liesse. Tous nous font des High Five. Je revis l’émotion de la médaille d’or d’Alexandre Bilodeau, à Cypress, en février 2010.

Je prends un dernier repas dans la cantine du stade de biathlon. Toute l’équipe EVS a ensuite rendez-vous à Priyut 1. Nous y recevons un certificat du CIO ainsi qu’une épinglette de remerciement. Le temps des au revoir est venu pour une partie de l’équipe. Avant de prendre le chemin du retour, je discute par Skype avec mes collègues du groupe 88 de la maitrise en gestion de la formation de l’Université de Sherbrooke.

Je reviens à l’appartement vers une heure du matin. Quelques uns de mes co-chambreurs dormiront à peine trois heures, car un autobus les prends ici à 4 h 30 afin d’arriver tôt sur le site pour la course de 50 km de ski de fond qui se tient à 11 h.

Il ne me reste que quelques heures à passer en sol russe. Demain, je vais au parc olympique acheter des cadeaux. Ensuite, je tente de me faire inviter à la maison du Canada pour voir la finale du hockey et la cérémonie de clôture. Lundi, je retournerai à Adler, pour marcher sur la promenade qui donne sur la mer. Trois semaines de vie en commune exigent pas mal de la part d’un solitaire de ma trempe. J’ai hâte de retrouver mon silence.

22 février 2014

Avant-dernière journée à Laura, dans un tunnel !

Jeudi. J’aurais pu dormir toute la journée. Il me semble en avoir un peu ras le bol de tout ça. Vous me l'écrivez, certains bénévoles positifs de nature le disent, nous avons choisis d'être ici. Nous vivons en direct cet événement planétaire, observé par des milliards de personnes. Vous êtes assis sur votre divan à la maison, devant votre télé LCD 42 pouces. Ou encore au bureau, en train de suivre les épreuves sur internet. Je n'ai pas le droit de me laisser abattre. Peu à peu, mon moteur s’active, l’énergie revient et je prend le chemin de Laura. À l’arrivée, je me dirige à la cantine du biathlon, question d’y prendre un repas. File indienne de cafétéria, soupe, salade, met principal, bouteille de Coke.

Je découvre ensuite notre assignation de la soirée. Nous sommes dans le tunnel qui passe sous la piste de biathlon et de ski de fonds. Avec Sergei, je contrôle l’accès de l’un des deux escaliers qui permettent aux gens avec des billets admission générale de se poster sur les côtés de la piste. Il y a plein de règles à respecter. Seuls les détenteurs de billets et les gens possédant les bons codes d’accréditation peuvent y accéder.

Avant-dernière compétition de biathlon, sport dont les russes raffolent. Des chauffeurs de mini-vans se présentent. Ce sont ceux qui nous conduisent sur le site, entre le bas et le haut. Ils nous permettent de sauver du temps et de l’énergie. Mon collègue ne me voit pas, je laisse passer les chauffeurs. Puis d’autres. Des jeunes russes bénévoles, qui sont au transport ou dans des lieux qui ne leur permettent pas de voir des compétitions en direct comme nous, arrivent. Même stratagème. Au diable les règles idiotes. J’ai été en reconnaissance à mon arrivée et il y a de la place en masse le long du parcours. Go, allez-y. Souriez, dites spasiba au canadien et enjoy the show.

Ils ont travaillé aussi fort que nous et n’ont pas eu la chance que nous avons de côtoyer les athlètes, les entraîneurs, les techniciens, les équipes de diffusion, journalistes et spectateurs. Je souhaite qu’ils gardent un bon souvenir de ce moment où un canadien qui parle pas vraiment le russe leur a offert un accès à un endroit interdit.

La soirée se termine en tendant la main aux gens qui doivent sauter du chemin enneigé à la route, pour redescendre à la base. Des dizaines de spasiba.

Je suis dans l’autobus, sur le chemin du retour, pendant le match Canada – USA. C’est plus rapide de le suivre par le biais de mon fil d’actualités Facebook que sur l’application des Jeux ! Je vous garantis une chose, ce match était fort suivi au pays !!!

En finale, en finale ! Wow. Demain je me mets à la recherche du meilleur endroit pour regarder la finale et les cérémonies de clôture.

Il est 10 h 15. Je termine la rédaction de ce billet. Je prends ma douche, passe à la cantine déjeuner (mioum, encore des crêpes à la viande hâché…), reviens à la chambre et monte, pour la dernière fois, à Krasnaya Polyana. Aujourd’hui, un Global Village est organisé. Nous pourrons échanger des objets. Il me reste encore des épinglettes et des objets promotionnels. C’est fou la quantité de cadeaux que j’ai apporté ici. Je ferai des heureux dans quelques heures. Le soleil est de retour. Ce sera une merveilleuse dernière journée sur la montagne, d’autant plus que nous serons dans les estrades.

Il y aura sûrement des larmes ce soir …

Skier dans les hautes montagnes du Caucase

À l’époque où j’étais au Cegep, je me suis mis à faire du ski alpin. Stoneham, Mont Ste-Anne, j’adorais le sentiment de découvrir le panorama du sommet et me laisser ensuite griser par la vitesse en descente. L’euphorie cédait ensuite sa place au calme, alors que je remontais en chaise. Sans oublier cette chaleur euphorisante dans le chalet en bois, la bière de fin de journée.

J’allais dans les agences de voyage pour ramasser les dépliants des séjours de ski un peu partout dans le monde. J’ai déménagé à Montréal, puis à Drummondville et me suis établi à Richelieu, en Montérégie. La famille a grandi, au son des rondelles dans les arénas. Le ski alpin a momentanément disparu de ma vie. En février 2010, lors d’une journée congé, j’étais aller skier à Whistler Blackcomb. Une des plus belles journées de ma vie. En juillet 2012, avec la famille, nous avons visité Chamonix, autre lieu mythique de montagne. Je me promettais de skier ici, sur ces hauts sommets du Caucase.

Jeudi 20 février. Je quitte notre village en compagnie de Andrea, Cheryl (deux canadiennes) et Will (anglais). Nous rejoignons, au Parc olympique, Tiziano (italien) et Polina (russe). Nous allons skier à Gornaya Karrousel. Le sommet est à plus de 7 000 pieds. Kevin et Catherine, de la Californie, y sont allé la semaine précédente. La vue y est magnifique, avec notre Laura tout en bas.

On arrive, on loue notre équipement et, bottes aux pieds, ski et bâtons en main, on marche vers la caisse pour acheter les billets de remontée. Catastrophe! Un des chairlift est en panne. Heure prévue d’ouverture, 12 h. Il est 10 h 30, le soleil brille. Déception totale!







Nous suivons les jeunes russes qui se sont rués au Subway. Nous découvrons avec stupeur qu’ils y vendent de la bière. Hey, c’est toujours l’heure d’un 5 à 7 quelque part sur terre. Une bière brune accompagne mon BMT. Retour à la caisse à midi pour apprendre qu’il n’y aura pas de ski aujourd’hui…





Nous passons devant la maison du Tirol depuis notre arrivée ici. Il est temps d’y effectuer une visite. On se croirait sur la terrasse d’un centre de ski alpin. Une bière, une deuxième. J’entends le mot Vermont. Je me retourne et jase avec un couple âgé. Ils sont avec leur fille, athlète américaine de biathlon. Ils me donnent l’une de ses cartes. Je respecte leur moment de paix en famille et ne demande pas de photo.

Nous aurons donc fait du ski de chalet aujourd’hui. Et obtenu tout plein de souvenirs de Innsbruck.

Ma journée s’est terminée en visitant la promenade côtière à Adler, avec une amie russe. Il fait bon de sortir de la bulle olympique, où tout est tellement similaire à Vancouver qu’on ne se croirait presque pas en Russie. Au retour, on regarde la cérémonie de médailles au Parc olympique.

Là, le décompte commence pour vrai. Il me reste deux quarts de travail à Laura. Des gens prennent déjà le chemin de la maison. Le 4 février, nous posions nos valises ici. Le temps est venu de repartir vers nos demeures. De reprendre un rythme de vie normal quoi.

21 février 2014

Enfin de la neige à Laura !

Hier (mardi), un déluge s’est abattu sur le Parc olympique et sur Krasnaya Polyana. La beauté de la montagne fait en sorte qu’à Laura, au-dessus de 4 000 pieds, cette pluie s’est transformée en neige. Aujourd’hui, notre équipe est postée à l’entrée du Hub, tout au fond de la vallée. Et à peine 15-20% des spectateurs utilisent cet accès. Nul besoin de vous dire que ce sera plutôt tranquille ce soir.

*** Je rédige ce billet vendredi matin. Il est 11 h 53. La cantine déborde. En ce vendredi, une minime partie de nous travaille ce soir. La majeure partie des bénévoles est donc en congé. Je suis assis à sur une chaise blanche. En face de moi, Don, un écossais vivant à Londres. À sa droite, Glenn, de Columbus Ohio et à ma gauche, Will, de Londres. Je tente d’écrire en intervenant dans la conversation. Les journalistes qui pondent des textes dans des salles de rédaction bondées m’impressionnent. J’imagine qu’avec le temps, on arrive à s’y faire.

Travailler tout en bas donc, là où les fleurs commencent à sortir. Je veux ma dose de neige fraîche. De la gare routière, j’emprunte donc la gondole menant à Priyut 2, tout en haut de Laura. De là, je redescend vers le chalet principal, marche dans la neige, prends des photos. Des bonhommes de neige ont mystérieusement poussé un peu partout. Cool à voir. J’ai vraiment hâte de revoir la neige et le froid du Québec.

Le rythme d’arrivée des spectateurs est lent. On se raconte nos vies. On compare nos passeports. Nous aidons les gens à passer sacs et manteaux au détecteur de métal. Nous vivons un rush de quarante cinq minutes pendant lequel plus de 1000 personnes passent par notre point d’accès. Retour au calme. Les russes suivent le match Russie – Finlande en direct sur leurs tablettes. Je leur demande le pointage. Un visage long, désabusé, me dit 3 -1 Finland, period 2. Le pointage final sera le même. Les russes sont déprimés pas à peu près !! Je le suis un peu moi aussi, parce que nous voulions tant vivre une finale Canada – Russie.

Au retour, l’habitude guide immédiatement mes pas vers la cantine, question de manger et boire une énième tasse de thé. Les russes boivent du thé à longueur de journée. Ils sont absolument fascinés par le patin artistique. Tous les soirs, c’est ce qui joue sur les trois écrans de la tente. Et le hockey ? Ça vous tente pas ?

Je reviens à la chambre vers 23 h 15. Nous nous retrouvons et nous nous racontons nos histoires cocasses du jour. Le gagnant en ce mercredi est Igor, un russe qui réside en Floride depuis le début des années 90. Les larmes coulent tellement son histoire sur la neige transformée en glace à certains endroits est ahurissante. Une autre journée prend fin aux Jeux de Sochi.

19 février 2014

Une journée de congé à la flotte !

En revenant à l’appartement lundi soir, j’ai reçu un appel de Darima. Elle a obtenu des billets pour le match Slovénie – Autriche. Pas question de refuser cette offre de voir un match de hockey olympique dans l’aréna où, dans quelques jours, tous attendent une confrontation pour l’or entre le Canada et la Russie. Elle avait aussi des billets de curling, tôt le matin. Pépé Christian a préféré dormir.

Les nuages sont gorgés d’eau ce matin. Sur Facebook, mes amis décrivent le déluge qui tombe du ciel dans les montagnes. Il pleut à peine au Parc olympique. Un peu plus de 6000 spectateurs dans l’aréna. L’ambiance est pas mal géniale, bon enfant je dirais. Très loin des imbéciles hurlements de certains parents dans les gradins québécois !






À notre sortie, déluge. Nous nous dirigeons vers la maison de la Suisse, question de dîner. Une bière Baltika et de la bouffe suisse, trop génial. Ça change de notre bouffe de cafétéria ! Nous avons jasé avec un suisse et tout d’un coup, on s’est mis à parler en français. Il est originaire du Juras suisse. Pendant qu’on mangeait, un jeune russe s’est joint à nous. Comme le monde est minuscule, en découvrant que je venais du Québec, il m’a dit qu’il avait fait un échange étudiant à Stowe, au Vermont. En échangeant sur nos expériences respectives, il nous a partagé une maxime russe : “It’s better to see once than to hear a thousand times.” Merci Ivan pour cette pensée qui résume très bien ce que je vis en Russie.

Le déluge se poursuit de plus belle. Je me dirige vers le pavillon de Coca-Cola. Je suis en mission pour obtenir une bouteille des JO pour ma belle-mère, fan finie de Coke. La caméra et le iPhone sont dans le très humide à mon entrée dans la structure gonflable. Et je ne parlerai pas de mes pantalons ni de mon manteau …





J’entre à nouveau dans le pavillon des Jeux de 2018. Je veux m’imprégner de l’atmosphère de la Corée. Une de mes amies bénévole russe est accompagnée de sa fille de 22 ans. Alors une idée folle, ma fille et mon gars pourraient m’accompagner !!




Je suis revenu au village No 4 détrempé, quand même heureux de ne pas avoir eu à travailler sous la pluie. Complètement vidé, je me suis écrasé dans le lit et j'ai dormi de 18 h à 20 h. Demain, le soleil sera au rendez-vous pour ce qui s'avère le début du dernier droit de mes Jeux. Plus que trois quarts de travail.

Le déluge d’hier fait en sorte que ma montagne, Laura s’est recouverte de neige. Je quitte d’avance pour aller jouer dans la neige ! Wouhou !!!

18 février 2014

Dans les nuages ! Visibilité presque nulle

Dimanche soir, Laura a été enveloppé dans un nuage. La brume s’est installée, forçant l’annulation de l’épreuve de biathlon. Lundi, à mon arrivée sur le site vers 14 h, les conditions n’étaient guère mieux. Les équipes étaient en attente. La cantine débordait de bénévoles qui mangeaient et tuaient le temps en attendant le rapport météo pour la soirée.





Le verdict est tombé vers 16 h 30. L’événement va se tenir. Nous sortons et prenons connaissance de nos positions et de notre rôle pour la soirée. Dans un premier temps, je surveillerai une barrière que des spectateurs ont tendance à enjamber pour sauver du temps, traversant ainsi le parcours de ski de fond, parallèle à celui du biathlon. Dans un second temps, je me déplace plusieurs centaines de mètres plus loin, pour favoriser le départ des spectateurs par le biais d’une gondole qui les montent à Priyut 2.

Je peux vous confirmer que la majeure partie des communications est non-verbale. Un jeune dans la vingtaine a sauté la clôture pour venir chercher quelque chose sur la piste. Je l’ai regardé et lui ai fait signe de revenir de l’autre côté. Il a fait semblant de ne pas me comprendre. J’ai haussé le ton en faisant des mouvements avec le bras. Croyez-moi, un “Move. Now. Get out of here!” répété de plus en plus fort avec des gestes forts éloquents provoque une obéissance immediate.

Lors de la sortie des spectateurs, je me suis à nouveau amusé avec les enfants, en leur donnant des épinglettes et des petits drapeaux canadiens. J’étais posté sur un palier, entre deux volées de marches. Plusieurs groupes chantaient. Cela m’a donné une idée pour la prochaine fois. M’adresser à la foule en anglais, en leur disant que je suis canadien et que j’aimerais qu’ils me chantent des chansons russes! Je pourrai les enregistrer. Et les faire sourire.

En début de soirée, Sylvie, l’enseignante de Félix en sixième année à Richelieu, m’a écrit. Elle serait prête à faire un test Skype à 12 h 15. J’étais dehors, le site était rendu presque désert, j’avais la pleine puissance du réseau 3G de Megafon presque à moi seul. Test concluant. Ils me rappelleront au retour du dîner. À 22 h 40. Je retourne en bas de la montagne et m’installe sur un banc. À l’heure précise, Skype s’active. Je suis à côté des anneaux olympiques. Une famille se prend en photo. Je montre le panorama aux élèves. Les deux classes de sixième année sont réunies dans celle de Sylvie. C’est la nuit pour moi, il fait six degrés. À Richelieu, le soleil brille. Un à un, les jeunes se lèvent et viennent devant la webcam pour me poser leur question. Trop génial !

Des questions d’enfants, qui, dans le fond, sont aussi des questions d’adultes. Qu’est-ce que tu manges ? Est-ce que ton lit est confortable ? Ce à quoi je leur réponds que c’est comme dans un camp de vacances. De la nourriture de cafétéria, simple et nourrissante. Un lit avec un matelas en mousse de trois pouces d’épais. As-tu vu des athlètes de près ? Oui, à tous les jours. Sauf que je ne les connais pas. J’ai une photo avec un champion olympique canadien, Pierre Harvey. Est-ce que les russes sont gentils ? Oui très gentils. Et en leur répondant cela, un couple passe devant moi et m’adresse la parole, en russe. Je leur montre le téléphone et dit deux mots : Skype. Canada.

Voilà. Tout est dit! Une autre journée se termine. Le décompte du départ est débuté. Plus que six journées au pays des tsars. Une incroyable aventure humaine prendra fin.

17 février 2014

Un nouveau rythme

Hier (dimanche), nous avons inversé les quarts de travail. Depuis le début, je faisais partie de l’équipe de jour. Lever à 5 h 30, déjeuner dans la cantine, deux heures de déplacement vers le workforce checkin de Laura, quart de travail et retour au village No 4 vers 21 h. Le temps de souper, de prendre une douche, de jaser de nos journées et le sommeil venait entre minuit et une heure. De longues journées. Trèèèèèès longues journées. La vie de bénévole, ou encore d’employé, que ce soit pour les médias, la gestion alimentaire ou autre, n’est pas de tout repos. Elle n’est surtout pas faite pour n’importe qui. Une immense dose d’énergie est requise pour passer à travers de cette épreuve.

Je suis un oiseau de nuit et donc, par opposition, pas un gars matinal. Samedi, j’ai atteint le fond du baril. Le monsieur sourire ne trouvait plus son éclat de rire. Il y avait beaucoup de sable dans l’engrenage de l’interrupteur on/off. Je suis passé par quelques heures d’un je- m’en-foutisme total. L’état dans lequel plusieurs humains se trouvent en permanence. Le présentéisme au travail, vous connaissez ?

Je me suis fait presque peur. Pendant quelques minutes, j’ai même pensé revenir à la maison.

Et une fois de plus, la magie a opéré dans ma vie. Nous sommes passé à l’horaire d’après-midi / soirée. J’ai pu me lever à 10 h, après une longue nuit de neuf heures de sommeil. J’ai pris mon temps dans la chambre, seul. J’ai commencé le téléchargement des photos sur Flickr (regardez dans la barre de droite pour y accéder), complété des billets de blogue. J’ai pris la route de la montagne à midi. Le ciel à Adler était nuageux, tout comme aujourd’hui d’ailleurs (j’écris ce billet lundi matin, avant de me rendre à Laura). Surprise en arrivant à Krasnaya Polyana, le ciel est partiellement nuageux. Encore mieux, le soleil brille sur Laura. Je peux donc admirer le fabuleux panorama offert par Priyut 2, notre bureau pour la journée. Il s’agit du plus haut point de la station, avec une vue sur presque 360 degrés. Nous dirigeons les spectateurs entre une gondole à 20 personnes qui rejoint la gare de Krasnaya Polyana à deux moyens de descendre vers les stades de ski de fond et biathlon : une chaise quadruple, qui avance à pas de tortue, ou une gondole à 8 personnes.

Je suis un fan fini de l’hiver, le Québec vient de recevoir une bordée de neige appréciable. Sur la côte de la mer Noire, point de neige. On se croirait à la fin avril. Me retrouver ici, à plus de 4500 pieds d’altitude, entouré de murs de neige de quatre à six pieds de hauteur et d’une vue extraordinaire sur les sommets, constitue donc une bouffée d’air frais. L’énergie revient.

La vue est tellement incroyable, des m’entourent. Je suis un fan fini de l’hiver. Les nuages commencent à s’installer vers 18 h. Les spectateurs sont tous arrivés pour l’épreuve de biathlon prévue à 19 h. Darima envoie la moitié de l’équipe souper. Le nuage prend d’assaut la montagne. La visibilité se réduit. En sortant de la cantine, nous apprenons que l’épreuve est remise à demain. Nous devons rejoindre nos positions au p.c. Le hic ? Nous suivons le flot de spectateurs déçus qui remontent eux aussi. On se la fait donc à la russe qui joue du coude dans une file. Mettons que je me sentais un peu (pas mal…) gêné.

Je suis revenu à l’appart vers 23 h. À minuit, fin des émissions.

11 h 05, lundi matin. Un super 9 h 30 de sommeil. Je débute ma troisième semaine loin de Nathalie et des enfants. Je ne pourrai jamais les remercier assez de me permettre de vivre ma passion de découvrir le monde et les gens qui y vivent.

Je publie ce billet, retourne à la chambre ramasser mon sac à dos et hop ! La routine reprend. Marche, autobus WF2, marche, autobus B11, marche, gondole, marche, gondole. Deux heures de trajet.

Deux heures du matin pour vous. Savourez votre café en lisant ce billet. Ici, je suis sur le thé noir depuis deux semaines. Les russes boivent peu de café.

Bonne semaine !

16 février 2014

Jour 8 – Être sur la pente descendante

Samedi 15 février. Le septième jour de compétition à Laura. Hier soir, la fatigue se lisait dans les yeux des bénévoles. Durant la première semaine, nous étions tous en mode découverte. Tout était nouveau. Nous devions nous adapter, établir nos repères. Dans la deuxième semaine, la routine s’installe. L’équipe de jour qui part très tôt le matin. L’équipe de soir qui revient entre 23 h et minuit. L’effet de nouveauté et de Wow perpétuel se dissipe peu à peu. Il y a peut-être aussi le fait de passer la Saint-Valentin loin de nos proches qui entre en ligne de compte. Ceux qui n’étaient pas en grande forme physique avant de venir ici ressentent la lourdeur dans les jambes.

Je constate que je suis en excellente condition physique, comparé à 2010. J’anticipe avec joie de marcher dans la neige en altitude, de respirer cet air sec et frais en montagne. Regards longs, blasés, les bénévoles frappent donc le mur ces jours-ci. J’avais vécu une expérience similaire à Vancouver. Une espèce d’écoeurantite aigüe qui s’installe peu à peu, sournoisement.

Aujourd’hui, notre équipe est au pied des escaliers roulants, au hub Laura. La majeure partie des spectateurs et des gens accrédités passe par d’autres accès. Le boulot est plutôt relaxe. J’ai le temps de prendre des notes dans mon carnet Moleskine. Lorsque des gens arrivent, je mets la « switch à on » comme le dit le conférencier Sylvain Boudreau. Une délégation de norvégiens arrive. Je n’ai pas été assez vite pour sortir a caméra, subjugué que j’étais par leur magnifique accoutrement. Souliers ou bottes en cuir, bas de laine beige, culottes sous les genoux, manteau bleu Dale of Norway avec motifs rouges et beiges, sac à dos de marche style vintage. Et des drapeaux. Mon wow de la journée !

Passer un quart de travail ici me permet de réaliser à quel point je suis choyé de me trouver en montagne et de changer de lieu de travail tous les jours. Les gens du transport, par exemple, restent toujours au même endroit. De par ma condition d’international, je suis souvent aux contrôles d’accès, là où passent les internationaux. J’interagis beaucoup avec eux. Par exemple, je vois deux japonaises arriver vers moi. Je leur souhaite la bienvenue en anglais. Pendant qu’elles passent leur accréditation au lecteur optique, je demande « Hello in japanese is harigato right ? » Les filles confirment, sourient et s’engagent dans l’escalier roulant. Je viens peut-être de faire leur journée. Le service, c’est souvent ça, de minuscules choses qui semblent anodines.

J’observe le chien qui semble avoir adopté ce secteur de Laura. Il possède d’immenses pattes, pour un jeune. Je me demande de quelle race il peut bien être.








Le biathlon fait relâche ce soir. L’équipe EVS de Laura est donc conviée à un petit party dans la tente située derrière le chalet. Nous écoutons le match Russie-USA. Les russes sont en délire à chaque fois que leur équipe compte. Ils sont beaux à voir ! La musique joue à tue-tête. L’énergie se remet à circuler.
Il est 11 h 40, en ce dimanche matin nuageux. Au Québec, vous dormez. Je publie ce billet, vais manger à la cantine, revient à la chambre me changer et prend la route pour la montagne. Ce soir, nous travaillons à Priyut 2, le point le plus élevé du site Laura. La gondole de 30 personnes y arrive, ainsi qu’une chaise quadruple. J’ai hâte de découvrir ce lieu que plusieurs décrivent comme paradisiaque. 

Bon dimanche !

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